Le renoncement à l'effort-volonté.

 

Yoga Sutra II.46 :

Asana : être fermement établi dans un espace heureux (traduction de Gérard Blitz)

Yoga Sutra II.47 :

Grace à la méditation sur l'infini et au renoncement à l'effort-volonté.

 

Ce sutra II.47 nous donne la mesure du travail dans le yoga.

Petit rappel : quand les yoga sutras parlent de "Asana", "la posture", ils parlent en particulier de la posture assise. 

"La méditation sur l'infini" : déjà, pour pouvoir "méditer sur l'infini" il faut atteindre l'état de méditation.

Ce n'est pas gagné !

Cet état de méditation est un état qui nous est donné. Nous avons "la main" pour établir les conditions de mise en place de cet état, mais nous n'avons pas la main pour le déclencher.

Une fois la "méditation sur l'infini" établie (au passage, il y a de multiples "formes" ou "représentations" de l'infini), nous pourrons commencer à aborder la seconde partie de ce sutra : le renoncement à l'effort-volonté, car nous aurons créé en nous un ancrage suffisant, un recul nécessaire, pour pouvoir nous examiner dans la posture et essayer d'avancer sur ce renoncement.

Pendant de longues années, j'ai essayé de "maîtriser" la posture (assise).

Il m'a fallu très longtemps avant d'arriver à comprendre ce que mon enseignante voulait dire quand elle parlait de "se donner les moyens", de "créer les conditions de la posture assise".

Au fil du temps, on s'aperçoit que les exercices préalables à l'assise, les postures, les enchainements, la respiration et surtout l'attention avec laquelle nous conduisons tout cela, attention que nous allons approfondir petit à petit, nous nous apercevons donc que tout cela a réussi à mettre en place une posture "qui tient toute seule". 

Mais pour tenir toute seule, la vigilance va devoir être permanente. Quelques secondes d'inattention, et patatra, l'édifice ne tient plus. Le mental reprend alors le pouvoir et adieu le renoncement à l'effort-volonté.

Puis nous en arrivons à un degré supplémentaire de subtilité : le renoncement à l'effort en ce qui concerne la respiration.

Nous avons tous connu, à un moment ou à un autre, le "combat" que nous menons avec la respiration.

Les techniques de respiration nous poussent d'une part à un contrôle de celle-ci. D'autre part la nature du mental ("je sais", "ja vais y arriver"...) nous pousse également à ce contrôle.

L'étape suivante, après le "lâcher prise" sur la posture, va donc être le "lâcher prise" sur la respiration. C'est à dire trouver et se couler dans une respiration qui ne soit pas le fruit d'un effort-volonté, mais la respiration créée par notre posture, notre conscience de celle-ci, les différents exercices qui nous ont amené à cet état et finalement cette fameuse "méditation sur l'infini" dont parle la première partie du sutra.

Enfin, une troisième "couche" de ce "renoncement à l'effort-volonté" va émerger petit à petit à la conscience. C'est en tout cas, le cheminement qui s'est passé pour ma propre pratique.

Il s'agit de toutes les "images mentales" que nous créons pour accompagner cette pratique.

Par exemple : la méditation sur l'infini va nécessiter, à un moment donné de "créer en soi" une  représentation symbolique, ou ressentie, ou imaginée, de cet infini.

Ceci est encore un effort que peu à peu nous allons pouvoir "lâcher".

Ce travail est très subtil. Il nécessite une vigilance constante quant aux pensées qui pourraient venir d'instant en instant. Certains jours, il est impossible à mener. Le mental est bien trop indiscipliné pour le faire, la motivation n'est pas là. D'autres jours, une petite avancée est possible. Nous arrivons à ne pas encourager une impulsion tendant à maitriser telle ou telle direction mentale que nous voudrions imposer.

Et petit à petit, nous arrivons à nous dégager de cette volonté d'imposer une direction mentale à notre pratique de l'assise.

On arrive alors à un état de méditation qui semble prendre tout l'espace intérieur.

Même les différentes directions que l'on donne à son mental pour observer telle ou telle partie du corps (afin de conserver la vigilance sur la posture) disparaissent. On est dans un regard global et on se laisse porter par une force qui n'éprouve plus le besoin de vigilance.

La posture tient, la respiration se manifeste d'une façon que nous ne pouvons que contempler avec étonnement et il n'y a plus de direction d'observation à donner à son mental. Tout devient source d'étonnement et de contemplation. Comme une suite de paysages que l'on observerait de l'intérieur.

 Petite mise au point : le but de cet article n'est pas de dégouter le débutant ; car le travail que je décris, on le voit bien, suppose des années et des années de pratique.

Le but est simplement de montrer qu'au delà de toutes les représentations très extérieures que nous pouvons avoir du yoga en occident, la direction du travail, inscrite dans les yoga sutras, est purement intérieure.

Personne ne verra si un adepte est plus ou moins avancé dans le yoga. C'est ce qu'il se passe à l'intérieur, non visible de l'extérieur, qui en donne la mesure.

 

 

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